La restitution des ivi tupuna : une priorité pour la DCP (Hiro’a n° 206 – Février 2025)
Rencontre avec Anatauarii Tamarii, chef de la cellule du patrimoine culturel de la Direction de la culture et du patrimoine (DCP). Texte : Pauline Stasi – Photos : DCP
Depuis deux ans, la Direction de la culture et du patrimoine (DCP) s’est engagée activement dans une démarche de collaboration avec plusieurs institutions muséales internationales en vue de rapatrier les ossements humains de Polynésiens, ivi tupuna. Ces restes, parfois prélevés de manière illégale, ont été intégrés dans les collections de musées étrangers au cours du siècle dernier. L’objectif de ce projet est double : restituer ces ossements à leurs communautés d’origine et les réinhumer dignement sur leurs terres ancestrales.
En novembre 2024, Anatauarii Tamarii, chef de la cellule du patrimoine culturel de la Direction de la culture et du patrimoine, revenait d’une mission un peu particulière de trois jours à Washington. Parmi ses bagages, une malle et un sac où se trouvaient précieusement emballés des ivi tupuna, des ossements de Polynésiens. « Ces ossements avaient été collectés entre 1956 et 1958 à Tahiti et à Makatea. Parmi ces restes humains, il y a notamment un crâne complet d’un jeune homme, un autre d’un enfant, des fragments de crâne d’un nourrisson… Au total, ils pourraient représentés entre 7 à 15 individus », précise l’archéologue.
Ces ossements, restitués à la DCP par le Smithsonian Museum à Washington D.C, sont le fruit d’une collaboration menée ces dernières années par la Direction. Ils témoignent de la volonté constante de la Polynésie française de renforcer les liens avec son patrimoine culturel dispersé à travers le monde. Cette restitution n’était d’ailleurs pas la seule en 2024. Ainsi, au mois de juillet, une collaboration avec le Bishop Museum de Honolulu à Hawaii a également donné lieu à une restitution de ivi tupuna.
Des réinhumations prévues en 2025
Mais si le rapatriement en Polynésie française de ces ossements est effectivement un motif de satisfaction pour la DCP, l’ultime souhait de la Direction ait qu’ils retrouvent leurs terres d’origine. À cette fin, des échanges ont été initiés avec les municipalités de Paea et de Makatea, communes d’origine de ces ivi tupuna. Une première rencontre s’est déjà tenue avec Antony Géros, maire de Paea, et un entretien était prévu avec Julien Mai, maire délégué de Makatea fin janvier.
« L’objectif principal de ces réunions est de planifier les réinhumations en collaboration étroite avec les autorités locales et les associations communautaires. À cet effet, la DCP bénéficie du soutien de l’association Te Tupuna Te Tura, forte de son expérience passée en matière de rapatriement, notamment depuis le Bishop Museum en 2002 », indique Anatauarii Tamarii, avant de préciser : « Les premières réinhumations devraient avoir lieu à Paea, sur le marae Ta΄ata, au cours du premier semestre 2025. Concernant, les ivi tupunade Makatea, les réinhumations devraient avoir lieu au milieu de l’année 2025. Les cérémonies seront organisées dans le respect des traditions locales, en partenariat avec les communautés et autorités concernées. Elles incarneront un moment de recueillement et de reconnexion avec les ancêtres. »
Poursuite des collaborations internationales
Parallèlement à ces actions locales, la DCP continue de renforcer ses relations avec les institutions muséales étrangères. Des discussions sont actuellement en cours avec un musée en Arizona pour négocier la restitution de restes humains polynésiens et le partenariat avec le Bishop Museum est toujours très actif. « Ces collaborations s’inscrivent dans une vision à long terme pour étendre ce travail de restitution à d’autres collections, tout en sensibilisant la communauté internationale aux principes éthiques relatifs aux ivi tupuna », insiste le chef de la cellule du patrimoine culturel. ◆
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La restitution des ivi tupuna une priorité pour la DCP (Hiro’a n° 206 – Février 2025)